Aujourd’hui l’Afrique, et principalement l’Afrique de l’ouest, semble être engagée à ouvrir une nouvelle page de son histoire avec (encore ?) les intellectuels comme détenteurs du stylo et du cerveau pour la rédaction de ce qu’ils considèrent comme pages manquantes des livres de l’indépendance. Si cette prise de conscience est à saluer, le défis reste la concordance des voix et des savoirs pour le développement d’un chapitre robuste devant servir de boussole pour le « lettré » et « l’illettré » de tous les groupes et communautés. Pour contribuer à la création de « nouvelles connaissances » sur un des aspects de cette nouvelle page (le débat sur la démocratie), nous ouvrons ce débat qui se veut intellectuel. Pour planter le décor pour des contributions et échanges interactives, nous faisons deux zooms sur deux systèmes endogènes de gouvernance au Burkina Faso : le système Moaga et le système Dagara.
Zoom sur le Système Mossi.
Le système de gouvernance chez les Mossi était et est toujours caractérisé par un véritable partage du pouvoir entre différentes classes sociales, chacune jouant un rôle fondamental dans la vie du royaume. L’idée de la nécessité de garantir une autonomie et aussi promouvoir une interdépendance entre les autres rois ou chefs (militaires, religieux, etc.) et le Moogo Naaba n’a pas été tirée d’un livre quelconque. Elle est venue de l’intelligence et de la science politique Moaga.
Les consultations pour les prises de décisions ont toujours été et sont toujours ouvertes et gouvernées par des principes de gestions savamment entretenus par l’intelligentsia traditionnelle Moaga. Des lois non écrites, mais maitrisées, permettaient de préserver la cohésion sociale et de tenir les chefs et rois redevables entre eux et envers la population.
Zoom sur le system Dagara…
Le système de gouvernance Dagara est un system complexe hiérarchisé et centré sur un partage horizontal et vertical du pouvoir. Les Chefs chez les Dagara (de famille ou de terre) ont un pouvoir concédé, exprimé généralement sur des questions sociales et surtout d’intérêt collectif (famille, clan, village, etc.). En dehors du domaine concédé, ils prennent le même statut que tout le monde et doivent compter sur les titres de doyens dans des domaines spécifiques (pas forcément liés à l’âge).
Le pouvoir centré sur une seule personne n’existait pas chez les Dagara, depuis leur séparation avec les royaumes Mampoursi et Dagomba, et ce jusqu’en 1903 où l’administration Britannique a réimposé le système de chefferie chez les Dagara du Ghana pour des besoins coloniaux, et plus tard au Burkina Faso par les colons français. L’amère expérience Dagara avec le pouvoir absolu du roi Dagomba et de ses voisins Mampoursi et Gondja, avait amené le Dagara à jurer de ne plus confier tous ses droits à un seul individu. Il concevra donc un système complexe où chacun a ou peut avoir un pouvoir absolu d’une situation à l’autre. Le père peut devenir le fils de son fils, puisque le grand-père et le petit-fils sont des frères ; l’enfant de 2 ans initié est un doyen dans des cérémonies d’initiation devant un vieux de 80 ans, initié après lui. La femme dépend de l’homme dans certaines situation, et est la seule à avoir le dernier mot dans d’autres situations, etc.
Alors qu’est que la démocratie dite « occidentale » a apporté ?
Peut-être le nom ? Peut-être des idées sur comment fédérer les idées démocratiques des différents peuples pour un système unique ? En tout cas, tout porte à croire qu’elle a été battue et se consolide sur base d’éléments de notre contexte ; et notre contribution sera plus utile dans sa complétion avec des éléments toujours manquants. Rejeter la démocratie sous prétexte qu’elle est importée c’est donner un fouets aux autres pour qu’ils nous flagellent, nous qui avions peut-être inspiré ce système écrit.
Ne devons-nous pas réfléchir plus sur la correction des imperfections que sur une possible substitution ? Nous ouvrons le débat et encourageons des contributions citoyennes. Le Cidoc donne du prix au respect des opinions des autres et vous encourage à commenter et contredire sans insulter. Enseignez-nous ce que vous savez des systèmes africains et non-africains et le lien qu’ils ont avec la démocratie (liens de divergence ou de convergence).